Touhou 8 Imperishable Night [PC]
On aborde maintenant le 8e épisode de la série de Danmaku indépendante la plus connue au monde. Alors l’esprit Touhou est-il toujours présent ? Cet épisode renouvelle-t-il l’intérêt ? Que vaut-il au final ? Réponse dans un article écrit au clair de lune la nuit du 14 juillet (comprenne qui pourra).
Alors que le festival de la moisson lunaire bat son plein, les youkais de Gensokio sentent que quelque chose ne tourne pas rond avec la lune. En effet, celle-ci a été remplacée par une fausse qui ne peut jamais devenir pleine. Pour sauver le festival, nos héros vont partir à la recherche de la véritable lune et du coupable de cet incident.
Il est difficile de répondre à la simple question “pourquoi a-t-on enlevé la lune ?” en une phrase. Le scénario puisse ses inspirations dans le “conte de la Princesse Kaguya” et force est de constater qu’il est plus étoffé qu’il en a l’air au premier abord. Pour ceux qui voudrait en savoir plus (car tout n’est pas expliqué dans le jeu), je vous conseille de vous renseigner sur le background de la princesse lunaire Kaguya (en français en descendant la page).
Cet épisode marque l’apparition d’un faible nombre de nouveaux personnages culte. Le plus notable est sûrement Reisen, une lapine lunaire maîtresse des illusions qui fera un grand nombre d’apparition dans les épisodes postérieurs. Comme dans The Embodiment of Scarlet Devil, les boss finaux forment une sorte de grande famille. Au sein de celle-ci, on trouve bien sûr Reisen mais aussi sa “petite soeur” Tewi, qui fait office de Mid Boss, Eirin, un génie combattant en utilisant la médecine et bien sûr la princesse Kaguya, la véritable Mastermind de cet incident. On retrouve aussi Mokou, la rivale de Kaguya et boss immortel de l’extra stage.
Niveau réalisation technique, le jeu reste sur les bases de son prédécesseur, on note quand même l’apparition de nouvelles sortes de projectiles mais c’est bien tout. C’est artistiquement que le jeu tire son épingle du jeu, bien qu’étant un cran en dessous du magnifique Perfect Cherry Blossom. Les deux premiers niveaux ne sont pas particulièrement originaux puisque ce sont des forêts constituées des mêmes arbres abstraits que l’on trouvait dans Touhou 7. Le niveau 3 possède un style très particulier, dans celui-ci, on traverse un village dont l’histoire a été dévoré par un yokai, le village apparaît en fond dessiné à l’encre, ce qu’il y a d’intéressant c’est qu’il a un deuxième fond défilant à une vitesse différente et représentant le même village, cela donne l’impression que le village est plus grand qu’il l’est et il y a un jeu de couleurs intéressant entre ces deux fonds.
Le stage 4 vous voit survoler une forêt de bambou en 3D, qui est plutôt bien faites je dois dire. Une fois arrivée au boss, la fausse lune se dévoile brutalement à vous au même moment que la musique dévoile son climax, c’est le même genre de mise en scène que dans l’opus précédent et il est bon de voir que ZUN a continué de se servir de la musique au service de la mise en scène.
Et là le boss arrive et c’est un des TRÈS TRÈS rare moment fan service PC-98 de la série. En fonction, du personnage que vous aurez pris, vous affronterez soit Marisa soit Reimu dans un superbe combat, accompagné de leurs patterns de Lotus Land Story revu et corrigé et d’excellent remix de leur musiques originales : Love-Colored Master Spark et Maiden’s Cappricio. Pour avoir commencé la série avec les premiers épisodes, je peux vous dire que j’ai adoré ces deux clins d’œil.
Le boss du stage 5 n’est autre que Reisen. À l’instar de Sakuya et de ses couteaux, Reisen amène avec elle ses propres projectiles : des balles, oui, vous avez bien lu, Reisen vous tire dessus avec d’énormes balles d’armes à feu. Ses patterns sont très originaux, pas seulement à cause de la forme effilée de ses bullets mais également à cause de son pouvoir d’illusion. En effet, elle se mettra régulièrement à rendre ses projectiles inoffensifs et à les déplacer, le joueur n’aura alors que quelques secondes pour trouver un endroit safe avant que l’écran ne redevienne un enfer de bullets.
Après avoir battu Reisen, vous accéderez soit, sous certaines conditions spécifiques, au niveau 6A menant à la fausse lune, soit, et sous des conditions encore plus spécifiques, au niveau 6B menant à la vraie lune. Les niveaux sont très similaires, vous y traverserez un magnifique couloir situé dans l’espace, faisant apparaître par ses ouvertures une lune gigantesque et surnaturelle émettant une aura mauve, cette traversée surréaliste étant accompagnée d’un superbe thème au piano envoûtant : Voyage 1969. Finalement, le couloir se termine et la sublime lune nous apparaît tout entière, en même temps qu’un des deux boss au design particulièrement réussi. Le combat consiste des patterns très différents en fonction du boss que vous affrontez mais toujours très originaux, en fond des images de temples japonais et de la conquête spatiale apparaissent, ce qui est du plus bel effet.
C’est du Touhou, donc comme d’habitude la bande-son est énorme, voici une liste des musiques non déjà évoquées que j’ai préféré : Illusionary Night, Reach for the Moon, Song of the Night Sparrow, Nostalgic Blood of the East, Retribution for the Eternal Night, Flight of the Bamboo Cutter, Mystic Maple.
Ma musique favorite du jeu (et de la série post PC-98) Extend Ash ~ Hourai Victim, le très envoûtant, atypique et rythmé thème de l’extra stage. Un remix de ce thème sera d’ailleurs utilisé pour l’opening de la partie de l’anime consacrée à Touhou 8 (ici en version longue).
Si peu de nouveaux personnages marquent cet épisode, beaucoup d’anciens protagonistes font figure de personnages jouables. En effet, le joueur aura la possibilité de jouer avec des équipes de deux constituées à chaque fois d’un humain (human side) et d’un youkai ou d’un fantôme (phantom side).
Lorsque le joueur sera unfocused, il contrôlera le personnage humain et lorsqu’il activera le focus, il contrôlera le youkai de l’équipe. Les personnages possèdent toujours des vitesses, types de tirs et Spell Cards/bombes différentes. À cela s’ajoute la Last Spell, qui est une variation de la Spell Card du personnage, celle-ci s’active lorsque le joueur utilise une bombe pendant la Border between Life and Death, dans ce cas le personnage inutilisé utilisera sa Last Spell pour sauver le personnage courant. Les équipes possèdent toujours deux habilités différentes (plus petite hitbox, bombe bonus si un stage est complété avec moins de 3 bombes, …).
Les humains possèdent une habilité qui n’est active que lorsqu’ils sont pris, alors que les youkais utilisent un familier lorsqu’ils sont sélectionnés.
Les personnages jouables. Le fan service est très agréable.
Mais parlons brièvement des équipes et de leurs différences avant d’en venir à ce qui fait tout le sel du jeu. La première équipe est constituée d’un duo d’anthologie : Reimu et Yukari, cette dernière utilisant en plus Ran en tant que familier (qui autofocus les ennemis), vous imaginez bien que cette équipe est la plus puissante et cheatée du jeu, à l’image de la variation A de Reimu dans chaque jeu. On trouve ensuite Marisa accompagnée de la petite Alice, une équipe qui se veut toujours très rapide et avec une puissance de feu concentré vers l’avant. À noter que Marisa possède une habilité lui permettant d’utiliser les avantages du premier tiers de l’écran (récolte de tous les bonus à l’écran une fois passé cette frontière) même si elle n’est pas full power et ça me permet de mettre en avant le fait que cette mécanique est beaucoup plus utilisée que dans l’épisode précédent à cause du level design plus permissif.
La troisième équipe est composée de Sakuya et de sa maîtresse Remilia, qui se veulent plutôt équilibrées. L’habilité de Sakuya lui permet de ralentir la chute des bonus grâce à ses facultés temporelles alors que Remilia possède une sorte de tourelle chauve-souris en tant que familier. Cette tourelle est invoquée là où Remilia apparaît et ne bouge plus de sa position jusqu’à ce que Sakuya soit sélectionnée, cela rend cette équipe pénible à jouer pour les néophytes mais très fun pour ceux ayant un minimum rodé le jeu. Enfin, on trouve la jardinière bushido Youmu et la maîtresse des esprits Yuyuko. Youmu en tant que demi-humaine est un personnage un peu particulier et possède un familier au lieu d’une habilité, elle a un tir puissant qui va droit devant elle et son familier est une sorte de satellite fantôme qui tire dans la direction inverse d’où se déplace Youmu. Comme pour Sakuya B dans l’opus précédent, il est possible de bloquer le tir de Youmu vers le haut de l’écran en maintenant la touche bas enfoncée lorsqu’on se déplace dans la partie inférieure de l’écran. Yuyuko en totale opposition diffuse un très large tir en éventail.
En one créditant le jeu avec les quatre équipes, il est possible de débloquer les équipes solo (possibilité de jouer avec un personnage sans sa coéquipière). Ça n’a aucun intérêt scénaristique mais les yokais se révèlent assez intéressants à jouer seul, particulièrement Youmu qui peut bloquer son familier dans une direction en se mettant en focus.
Les ennemis et les boss peuvent aussi avoir des familiers et c’est un point très important du gameplay de cet épisode.
Les familiers ennemis sont des petites boules blanches qui vont tirer différentes sortes de projectiles en fonction de l’ennemi et du pattern de boss qui leur sont associés. Contrôler un personnage humain vous permet de détruire ces familiers. Alors que le phantom side vous permet de traverser les familiers (très utile lorsqu’ils vous foncent dessus) et de tirer au travers, prendre ce type de personnages vous permet aussi de détruire très rapidement les ennemis producteurs de familiers. Il y a donc beaucoup plus de stratégie à adopter pendant les combats contre les boss, puisqu’on va devoir aussi viser les familiers pour qu’ils ne tirent plus de projectiles. Quoique, ce ne serait pas mieux de se concentrer sur le boss pour que le pattern se termine vite au risque d’avoir un écran plus chargé de projectiles ? C’est une question que le joueur va souvent se poser et qui va avoir des réponses différentes en fonction du pattern pratiqué, de l’équipe prise et des habilités du joueur.
Une autre innovation importante est le système de temps qui remplace le très hasardeux système de Cherry point du précédent opus.
Le jeu commence à 23h et la lune doit être retrouvée avant 5h pour que le festival de la moisson lunaire soit un succès. Si le joueur finit un niveau en ayant récolté assez de temps, il gagne une demi-heure sur la traversée du niveau, chaque fois qu’il perd un continue, le jeu avance d’une heure. Le temps se récolte automatiquement lorsque le joueur tire sur des ennemis avec un personnage de l'“human side” ou lorsqu’il fait du grazzing avec un personnage du “phantom side”. Cependant pour que le temps puisse être récolté par l'“human side”, il faut que la jauge de Youkai soit remplie à 80% du coté humain, à contrario gagner du temps avec le phantom side nécessite que la barre soit à 80% du coté fantôme. Utiliser l’un ou l’autre des personnages fera monter graduellement la barre d’un côté ou de l’autre. Pour récolter le plus de temps possible, il faut donc faire en sorte que la barre soit tout le temps à au moins 80% d’un côté ou de l’autre (différentes techniques permettant de faire monter rapidement la barre comme utiliser une bombe) et essayer de s’adapter aux situations.
Si gagner du temps permet d’atteindre le dernier niveau du jeu (ce qui n’est pas bien dur, je vous rassure), cela permet aussi d’accéder au Last Spell (pattern bonus) de chaque boss.
En effet, si le joueur a récolté un minimum de temps lorsqu’il défait un boss, ce dernier lance un pattern un peu plus compliqué durant lequel le joueur ne perd pas de vie s’il meurt et durant lequel il ne peut pas utiliser de bombe. Pour débloquer tous les patterns, il faut donc jouer avec le temps. À noter que le second boss final possède 5 Last Spells différents, plus le joueur aura gagné de temps, plus il en verra.
La dernière feature intéressante est l’ajout du mode Spell Pratice qui permet de se refaire tous les patterns des boss très simplement, sans avoir à refaire les stages associés. Ce mode possède également des patterns exclusifs qui ne sont accessibles qu’en réussissant certains défis (finir le jeu en difficile avec Reimu, réussir le pattern n°XXX, finir l’extra avec au moins 3 équipes, …). Le mode, avec son système de pourcentage et ses défis, vient beaucoup gonfler la durée de vie.
En tant que boss immortel, Mokou ne cessera de revivre durant le combat de l’extra stage et sa magie de feu prendra parfois la forme d’un phénix pour vous attaquer.
Si elle est un cran en dessous Perfect Cherry Blossom, la réalisation artistique est encore une fois très réussie et sort des sentiers battue en s’attaquant à la nuit éternelle et à tout le champ lexical de la lune (phases, conquête spatiale, cosmos…). Le fan service est très présent grâce à l’incroyable nombre de personnages contrôlables, anecdotiquement le jeu possède le scénario le plus développé de la série (à égalité avec Phantasmagoria of Dim. Dream, même si Mystic Square est meilleur en matière de symbolisme).
Ce 8e épisode est aussi celui-ci qui possède le meilleur gameplay, le système d’équipe est brillamment mis en valeur par les familiers ennemis et le très original système de temps qui nécessitent que le joueur switch souvent avec les personnages et adoptent plus de stratégies durant les batailles.
Enfin le mode Spell Pratice, facilite énormément la capture de Spell Card et rajoute énormément à une durée de vie qui était déjà énorme.
L’un des meilleurs Touhou à n’en point douter.
Date de sortie : 2004